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Victor Hugo (les lettres)
En ce temps-là, les écrivains faisaient un courrier énorme en plus de leurs poèmes ou romans.
Victor Hugo n'a pas échappé à cette coutume.
L'une d'elle à sa mère :
à madame la comtesse Hugo, à Thionville.
23 mai 1814.
Ma chère maman,
depuis ton départ tout le monde s’ennuie ici. Nous
allons très souvent chez M Foucher, ainsi que tu
nous l’as recommandé. Il nous a proposé de suivre
les leçons qu’on donne à son fils ; nous l’avons
remercié. Nous travaillons tous les matins le latin
et les mathématiques. Une lettre cachetée de noir
et adressée à Abel est arrivée le soir de ton
départ. M Foucher vous la fera passer. Il a eu la
bonté de nous mener au muséum.
Reviens bien vite. Sans toi nous ne savons que dire
et que faire, nous sommes tout embarrassés. Nous
ne cessons de penser à toi. Maman ! Maman !
Ton fils respectueux.
Victor.
Ces deux-là à d'autres personnes :
à Madame Martin.
21 mai 1817.
Madame,
vous nous permettrez de vous rappeler que nous
sommes sans argent depuis le 1er. Comme nos besoins
sont toujours les mêmes, nous avons été contraints
d’emprunter. Nous vous prions en conséquence de
nous faire passer les 6 francs qui nous reviennent,
savoir : 3 francs pour le 1er mai et 3 francs pour
le 15, de nous envoyer un perruquier et de parler à
Mme Dejarrier pour nos chaussures et les chapeaux.
Daignez, madame, agréer l’assurance des sentiments
d’estime et d’affection que vous méritez de notre
part.
Vos très humbles et très obéissants serviteurs,
V Hugo, E Hugo.
à Monsieur Raynouard,
secrétaire perpétuel de l’académie française.
Paris, le 31 août 1817.
Monsieur,
retenu par une légère indisposition, je ne puis avoir
l’honneur d’aller moi-même vous témoigner ma
reconnaissance de la faveur que l’académie française
a daigné me faire en accordant une mention honorable
à la pièce n.15 dont je suis l’auteur. Ayant appris
que vous aviez élevé des doutes sur mon âge, je prends
la liberté de vous remettre cy-inclus mon acte de
naissance. Il vous prouvera que ce vers
moi, qui...
de trois lustres à peine ai vu finir le cours
n’est point une fiction poétique.
S’il était encore temps de faire insérer mon nom
dans votre rapport imprimé par ordre de l’académie,
ce serait augmenter infiniment la reconnaissance que
je vous dois, et dont je vous prie d’agréer la preuve
dans cette langue que vos encouragements me rendent
si chère et qui doit, à tant de titres, vous l’être
bien davantage encore.
J’espère de votre bonté, monsieur, que vous voudrez
bien, après en avoir pris connaissance, me renvoyer
mon acte de naissance rue des petits-Augustins, n.18.
Je vous prie d’agréer l’assurance du profond respect
avec lequel j’ai l’honneur d’être, monsieur,
votre très humble et très obéissant serviteur,
Victor-Marie Hugo.
J'aime ces lettres d'une autre époque. Cela change d'avec les SMS d'aujourd'hui,
de style télégraphique et écrits en phonétique.
Celles-ci écrites à leur père (des deux frères) :
au général Hugo.
20 juillet 1818.
La situation où nous nous trouvons semble ne nous
laisser le choix qu’entre deux états, la médecine et
le droit. Nous aurions songé au premier pour l’un de
nous deux, mais la difficulté de se faire connaître
dans une carrière épineuse, et surtout la longueur
des études (il ne faut pas moins de 7 ans pour être
reçu dans cette faculté) nous en ont promptement
détournés, par la pensée que nous resterions encore
trop longtemps à ta charge.
Le même inconvénient n’existe pas dans le droit.
Trois années d’études suffisent, en sorte que si tu
avais pu obtempérer à nos désirs quand nous t’en
avons parlé pour la première fois il y a deux ans,
nous ne serions peut-être plus un fardeau pour toi.
Nous avons considéré en outre que la connaissance
du droit était indispensable pour être admis aux
emplois de l’administration militaire et à la plupart
des charges de l’administration civile ; si d’ailleurs
nous nous trouvions tous les deux dans le cas
d’embrasser la carrière du barreau, ce n’est pas
dans une ville comme Paris que deux avocats
pourraient se nuire.
Quant aux arrangements relatifs au pensionnat, tu sais
bien, mon cher papa, qu’il n’est plus possible que
nous restions chez M. Decotte, maintenant que nos
études sont finies. Nous te proposons de nous donner
800 francs à chacun pour nos dépenses. Nous voudrions
te demander moins, mais tu sentiras que cela nous
est impossible, si tu considères que tu nous donnes
déjà 300 francs pour notre entretien, et qu’avec
500 francs de plus nous ne pourrons, sans la plus
stricte économie, subvenir aux frais de notre
nourriture, à l’achat de nos livres, au paiement de
nos inscriptions et diplômes, etc.
au général Hugo.
20 août 1818.
... tu sens qu’en sortant du pensionnat nous nous
trouverons dénués de tout, même de lits, si l’on ne
nous remet pas absolument tous les effets que nous
avons chez M. Decotte ; nous te supplions donc de
lui écrire pour que vers le 10 septembre, tout notre
mobilier, qui nous est actuellement si nécessaire,
se trouve à notre disposition.
Nous allons commencer notre droit : sois sûr, mon
cher papa, que dans tous les temps nous nous ferons
une étude de mériter ta satisfaction par nos travaux
et notre conduite. Cette année même ce n’est pas sans
quelque honneur que nous avons terminé nos cours ;
nous ne doutons pas du plaisir que tu éprouveras en
apprenant que nous avons obtenu des accessits dans
nos classes et au grand concours des quatre
collèges.
J'espère ne pas vous ennuyer de ces lettres qui me plaisent bien à moi.
lettres empruntées au site : http://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Victor_Hugo/Tome_I/8
L Y D I A
Tags : hugo, deux, francs, avons, ton
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Commentaires
c'était un temps sans ordinateur..;et chacun écrivait au moins une lettre par jour ..;un temps sans calculette et on savait son avoir au centime près..;un temps sans telephone et on restait en amitié sa vie durant ...
il avait la plume facile le totor, même si ça ne volait pas toujours tres haut comme certaine charade de sa jeunesse , très caca-boudin...mais quel genie et quel culot comme son Jérimadeth dans Booz endormi qui n'existe pas comme ville mais qui lui donne la rime à demandait(j'ai rime à dait).
les vieilles lettres sont des trésors.
bises
J'ignorais que mon cher Victor avait écrit du "caca-boudin" ; mais si tu le dis Josette, je veux bien te croire. Quant à Jérimadeth, c'est une trouvaille géniale qu'il a eue là. Ce poème est l'un des plus beaux qui ait été écrit par un poète. Même les Israëliens ne s'en plaignent pas. Car cet homme a écrit ses poèmes orientaux sans être jamais allé en Orient. Je dis Merci Victor d'avoir été aussi entreprenant dans tous les domaines de l'écriture. Les poèmes ne sont qu'une partie de son grand talent. Ses énormes romans : "Les misérables", "Notre-Dame-de-Paris", et plein d'autres, sont des livres que j'aie lus avec un immense bonheur et que je relirai encore avec autant.
Et bien sûr, le poète a tous les droits et n'a pas à s'en priver. S'il faut donner un passeport à un poète, c'est bien celui de la "fantaisie" qu'il faut lui attribuer ; tant qu'il a dans la tête du répondant...
Aliette-Lydia
Aliette
Et il le faisait bien. Quelle tête ! Cela coulait tout seul de sa plume inspirée !
J'ai cherché sur le site mon premier prénom Aliette. Il n'est pas répertorié. J'ai donc cherché mon deuxième prénom : Lydia, qui est répertorié lui. Il me ressemble. Il est vrai que le prénom ne suffit pas à lui seul à déterminer la personnalité d'un individu. Il faut aussi conjuguer avec le signe du zodiaque, son ascendant, etc.
Aliette-Lydia
Bonjour chère Lydia,
On savait écrire en ce temps là.
Il écrivait bien et j'aime beaucoup ses livres.
Maintenant, à peine si on reçoit une carte au nouvel an.
C'était le seul moyen d'envoyer les nouvelles.
Les gens étaient aussi plus respectueux.
Les temps changent. pour le courier, le PC a changé notre comportement..
Merci pour ce partage.
Bonne semaine.
Bisous
Je peux te dire que je suis quelqu'un qui correspond. J'écris à des correspondantes (une vingtaine) avec un grand plaisir.
Bisous,
Lydia
oui ces lettres sont très interessantes en effet, j'aime bien pouvoir imaginer Hugo autrement qu'en vieux monsieur barbu !
je découvre ces lettres
très respectueux Hugo
gros bisous et très belle semaine
•-~·*'Ś Ő Ń Ŷ Á'*·~-•
Dès son jeune âge, Hugo voulait "être Chateaubriand ou rien" !!!...
Je pense qu'on n'aurait pas quoi su faire de deux Chateaubriand (malgré une oeuvre estimable aussi, par ailleurs... !). Heureusement, nous avons eu un VRAI Hugo, avec toute sa personnalité (lol) !
Bonne soirée,
Gérard.
Merci pour ces beaux écrits , ces lettres sont un plus et j'ai eu un grand plaisir à les lire pour la première fois !
tu as de la chance de posséder le fameux livre des poèmes de ce grand écrivain .
Merci et bonne soirée . Je t'embrasse . huguette
Je l'ai acheté à France-Loisirs et bien que ce soit l'intégrale, il n'y a pas tout dedans. Il a fait tant de travail dans sa vie, qu'il est impossible de tout mettre dans un seul livre, même gros.
Bises,
Aliette-Lydia
Eh oui, les écrivains commencent tous à écrire en s'inspirant d'un monstre de l'édition.
Et ensuite ils trouvent leur vitesse de croisière et leur propre talent,
Aliette-Lydia
Il a été jeune, bien sûr, mais moi je préfère sa tête de papi barbu que sa tête d'homme plus jeune.
Lydia
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oucou Aliette !
Il était jeune Victor 15 - 16 ans c'est incroyable l'expression écrite .
Bonne soirée gros bizoux Françoise !