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Par CHAMARIE le 23 Avril 2014 à 18:22
Je lis vos commentaires mes amis et je me dis que je ne vais pas continuer à écrire sur ma jeunesse.
Vous n'êtes pas dans ma peau de soixante années en arrière ; vous n'êtes pas dans le contexte qui faisait notre vie familiale très très sévère, avec des parents arriérés, à une époque où la vie n'était pas libre du tout pour les jeunes et pour nous encore pire que pour les autres et donc, si je n'ai pas agi autrement c'est sans doute que j'étais trop écrasée, trop emprisonnée (c'est comme ça que j'aie ressenti ma vie d'alors enfermée à la maison pendant des années.) Vous me mettez mal à l'aise et du coup je ne me sens pas bien.
Ma sœur et mon frère aînés se sont écrasés aussi et ont déprimé. Ma jeune sœur n'a guère fait mieux non plus mais s'en est sortie parce qu'elle était comme ma mère et qu'elle a toujours été sa préférée. Cependant, cette sœur a aussi travaillé au bureau. Nous n'avons pas eu une vie de jeunes enviable du tout. Mon frère a eu à peine un peu plus de liberté qu'il a mal utilisée.
C'est moi qui ai pris le plus mauvais de ma mère parce que je n'étais pas comme elle. Ceci dit, je ne me rendais pas vraiment compte comment ma fratrie ressentait cette vie, ne leur ayant pas demandé car nous étions tous les quatre enfermés en nous-mêmes ; mais cette vie n'était pas bonne pour eux non plus. Je le garantis.
Du coup, je ne peux pas continuer cette histoire qui me plaisait à écrire parce que vous me mettez mal à l'aise de penser que vous auriez été plus forts, que vous auriez mieux réagis, que j'aurais dû faire ceci ou cela. Je me sens mal et cela me bloque.
L Y D I A
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Par CHAMARIE le 18 Avril 2014 à 18:14
J’avais eu mes règles tard (vers treize ans et demi) et ne les ai jamais eues de façon régulière. À dix-sept ans, j’eus une absence de règles de plusieurs mois. Mère eut alors un tas de soupçons. Elle s'imaginait que j'étais enceinte, ni plus ni moins.
Comment pouvait-elle avoir ce genre de suspicion alors qu'elle savait très bien que je restais à la maison tout le temps ? Elle pensait peut-être que cela avait pu m’arriver par l’opération du Saint-Esprit, comme pour la « Vierge Marie. » Ce n’était pas possible autrement. Or, à la maison, il n’y avait pas d’ange Gabriel qui traînait. Il ne valait mieux pas d’ailleurs. Et les gars de l’usine avaient bien trop peur d’elle pour risquer quoi que ce soit, comme par exemple s’approcher de moi.
Je ne sortais jamais seule donc je ne pouvais rien cacher. Cela aussi fut un poids lourd sur mes épaules. Je trouvai madame Mère trop injuste et ne compris pas son attitude stupide cette fois-là, pas plus que les autres. Je revois encore la tête qu’elle faisait. Une tête incroyable, des yeux durs qui la défiguraient. Je n’arrivais pas à la regarder sans frémir. Cela dura de longs jours. Jusqu’à ce que mes règles reviennent. Alors, tout reprit sa place. Sauf que j’y avais perdu des plumes et que la honte était sur moi.
Pourtant, quand on regarde les photos de madame Mère on a du mal à penser qu’elle pouvait être ainsi (avec moi du moins.) Elle montre un visage souriant (un beau sourire) et un air gentil. Je peux dite qu’elle était belle. Toutes les personnes qui l’ont connues ou approchées ont eu la sensation qu’elle était une femme très gentille. Comme quoi…
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Par CHAMARIE le 17 Avril 2014 à 18:50
Nos sorties étaient très réduites. Mère nous emmenait au cinéma dans le Bordeaux de cette époque où les murs de la ville étaient noirs. C'était une ville très triste à cause de cela. J'aimais aller au cinéma mais pas aller dans cette ville qui ne me plaisait pas. Elle a beaucoup changé maintenant ; après des années de nettoyage acharné, les pierres sont redevenues blondes et la ville a pris un air gai, pimpant et je me plais tant dans cette ville à présent, que je la fais visiter avec grand plaisir à qui le désire.
Nous allions au cinéma : madame mère, sœur cadette et moi, jamais petit père ne nous accompagnait. Cela ne lui plaisait pas. Il était toujours dans ses comptes et ses calculs. Au retour, je m'imaginais dans la peau de l'héroïne
Lorsqu'un bal se profilait à l'horizon, j'y pensais et en rêvais plusieurs mois à l'avance. Je passais ces sept longues années d'isolement à me résigner de l'ennui et de la tristesse de ma vie et à rêver d'autre chose. Je vivais dans le rêve tant le présent était vide et sans saveur. J'en avais si bien pris l'habitude que cela ne me passerait plus jamais par la suite.
Lorsque le grand soir du bal arrivait, madame Mère et petit père m'y accompagnaient avec, bien sûr sœur cadette! Madame Mère s'asseyait près de moi et de ma sœur bien sûr. Elle scrutait chaque garçon qui venait avec son regard bleu glacé et son air soupçonneux, tant et si bien qu'ils étaient refroidis et n'osaient pas m'inviter ni s'approcher de moi. Elle était capable à elle seule de décourager un régiment.
Malgré cela, je ne fis pas tapisserie pour autant. Mais je ne m’amusais pas beaucoup, comment l’aurais-je pu alors que je sentais sur moi le regard de ma mère. Et il était si peu encourageant ce regard-là. Mais c’était une sortie quand même et je tâchais d’en profiter au mieux. C'était comme ça, pratiquement tous les parents accompagnaient leur fille au bal.
Quand l'un d'entre eux arrivait à passer outre, le regard bleu-acier ne le quittait pas des yeux pendant toute la danse. Gare à lui si jamais il venait à s’égarer ! Jamais aucun ne s’y risqua. Cela ne se faisait pas à cette époque-là. Mais il y avait des filles plus libres que moi qui arrivaient à faire des « bêtises » avec des garçons, comme cela s’appelait encore. J’en ai connu…
Ma grand-mère, qui savait pourtant que j’étais surveillée et que je n’allais pas au bal seule, trouva le moyen de me dire que je faisais le mal en allant au bal. Quel mal pouvais-je bien faire ? C'était impossible. Il fallait qu’elle y mette de la mauvaise volonté pour arriver à voir des choses pareilles. Pourtant, elle était ma grand-mère préférée. Je me demande ce que cela aurait été si elle ne l'avait pas été.
Est-ce que les filles de maintenant se demandent si elles font le mal quand elles vont en boîte ? Et quand elles couchent à treize ans avec un garçon, est-ce qu'elles ont le moindre scrupule et est-ce que leur mère ou grand-mère les en empêche ou leur dit qu'elles font un péché ? Est-ce qu’elles vont se confesser au curé et leur dire qu’elles ont couché avec un garçon ? Non. C’est bien fini tout ça. Les US et COUTUMES ont changé de façon catastrophique dans ce domaine et dans plein d’autres. Plus aucun sens moral n’existe aujourd’hui. Peut-être sortent-elles blasées de ces longues années de coucheries avec les uns ou les autres. Peut-être que non. Peut-être est-ce mieux pour elles que ce que j’ai vécu. Pourtant, quand elles arrivent à l’âge de se mettre en ménage, elles ont déjà, pour certaines, un lourd passé sexuel derrière elles.
J'arrivai quand même à douter et allai voir monsieur le curé pour lui demander son avis. Il me répondit que moi seule savais. Je répondis en souriant : « Je le sais, je n’en fais pas » Je fus rassurée. C'était comme ça autour de moi ! Mère ou grand-mère ne savait que soupçonner et mettre dans ma tête des idées stupides et disproportionnées avec la vérité de ce que je vivais. Cela me blesse encore en l'écrivant.
Comment, après cela, arriver au mariage sans problème ?
Ma grand-mère était devenue intraitable avec la morale. Ayant oublié qu'elle, à une époque, avec le grand-père qu'elle détourna de son foyer et avec qui elle vécut plusieurs années avant de se marier, à une époque où cela ne se faisait pas, n'avait pas trop à se féliciter de cette attitude ni à me donner des leçons. Pourtant, c’est elle qui m’en donna le plus sans se gêner. C'était une époque ultra difficile pour les jeunes.
BONNE SOIREE
l y d i a
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Par CHAMARIE le 15 Avril 2014 à 13:22
L'année se termina, bien sûr sans diplômes. Il aurait fallu au moins une année de plus pour que je puisse acquérir des certificats. Mais je ne voulus pas y retourner une année de plus je l'ai déjà dit dans le treizième. Que me restait-il donc comme solutions ? Aucune. Je ne pouvais même pas commencer à travailler au bureau tout de suite puisque mes parents avaient l'idée fort bizarre d'embaucher la fiancée de mon frère qui avait elle aussi appris la dactylographie.
Comme si nous n'étions pas assez déjà de frère et sœurs, voilà qu'il fallait maintenant supporter une future belle-sœur. On n'en finissait pas. Je n'avais donc plus ma place dans ce bureau puisqu'il ne rentrait que deux personnes et le travail était à mi-temps l’après-midi.
Je dus donc me résigner à ne rien faire. C'est ainsi que, moi qui avais appris à tricoter à l'âge de six ans, me jetai corps et âme dans le tricot. C'est tout ce que je trouvai pour m'occuper. Le matin je me levai tard, vers neuf heures. Après avoir pris mon petit déjeuner, et avoir fait le ménage et la vaisselle, je prenais mon tricot. Je m'abonnais aux catalogues "Bergère de France" et chaque semestre recevais le nouveau avec les échantillons de laine qui me faisait baver. Je tricotais très bien et mes pulls étaient sur mesure.
Ma future belle-sœur décida, à cette époque, de prendre des cours de couture chez une couturière de Bordeaux. Elle me demanda si je voulais y aller avec elle, j'acceptai. Je commençai donc ces cours de couture avec elle qui s'en lassa très vite. Pas moi. Je continuai d'y aller seule car cela me plaisait beaucoup. J'appris à prendre les mesures, à faire mes patrons à mes mesures mais aussi pour les autres. Une fois par semaine j'allais chez cette femme qui donnait de très bons cours. Je ne me souviens plus si j'y passais une année ou deux mais, ce que je sais, c'est que je commençais à avoir quelques jolies robes à ma taille, bien cousus et bien finis. Très vite, je me montrais très douée dans ce travail manuel très féminin. Je les cousais chez la couturière n'ayant pas de machine à coudre à la maison. Mais je dois porter au crédit de madame Mère le beau cadeau qu'elle me fit pour mes dix-sept ans : une machine à coudre SINGER, à pédale et courroie, dans un meuble. Ce cadeau me fit très plaisir. Mère ne fêtait que les "dix-sept ans" de nous quatre et après c'était fini. Pourquoi me direz-vous ? Parce qu'elle-même avait eu cet anniversaire fêté par sa propre mère et donc, elle reproduisait.
Je me mis aussi à faire des tartes tous les dimanches. Ma sœur cadette m'aidait et nous squattions la grande table de la cuisine pour cette activité, dès notre retour de la messe. Cela se passa très bien et les tartes étaient bonnes, jusqu'au jour où madame Mère piqua sa crise de nerfs. La comédienne qui sommeillait en elle se réveilla et elle fit grand bruit. Elle alla piquer sa crise au fond du jardin et petit père dut aller lui demander pardon pour qu'elle se calme. Je ne compris pas quel pardon il pouvait lui demander car il n'avait rien fait de mal. Mais l'effet fut immédiat. Madame Mère réintégra "sa cuisine" et nous en fûmes chassées. C'en fut fini des tartes dominicales aux pommes des deux sœurs. C'est resté mon dessert favori et toute ma vie j'ai fait des tartes aux pommes. J'en ai fait d'autres aussi mais peu. Madame Mère avait une spécialité : le mias, une spécialité de Bordeaux.
Elle ne voulait pas nous apprendre à faire la cuisine. Je dus tout m'apprendre toute seule quand je fus mariée.
Mon frère eut droit, lui, à des suppléments d'école, un apprentissage de danse, le droit aussi de fréquenter une fille à dix-huit ans et bien d'autres choses. Il fut très privilégié par rapport à nous et cela parce qu'il était un garçon. Nous les filles, n'avions droit à rien d’autre qu'à rester dans notre coin, à ne rien dire, ne rien faire, surtout pas de bruit, être obéissantes et c’est tout.
Quand cette future belle-sœur vint travailler au petit bureau qui était dans la maison parentale, elle fut très bien vue par madame Mère. Elle était vaillante, on ne pouvait pas dire le contraire. Mais je me rendis vite compte qu'elle avait des problèmes. Elle nous fit très vite une première crise qui n'était pas très normale. Je mis personnellement du temps à savoir ce que c'était. C'était pourtant simple : hystérie. Personne ne fit la moindre réflexion sur ces crises bien sûr. Elle était bien vue et pouvait tout faire sans que rien ne lui soit reproché. Ce n'était pas comme moi, mais passons...
Elle et mon frère se marièrent à vingt-et-un ans. J'avais seize ans et demi. Mon frère qui faisait son service militaire invita trois de ses copains soldats. L'un des trois me plut particulièrement. Il nous enchanta en chantant des airs d'opérettes d'une belle voix de ténor. Je délaissais le cavalier que mon frère m'avait imposé et qui n'était pas à mon goût. De plus, il n'était pas beau, pas marrant, ne dansait pas, je m'ennuyais ferme avec lui. Tandis que le beau chanteur, grand, souriant et bon danseur me plaisait beaucoup plus. Je l'accaparai pour danser, pour parler et n'entendis que lui qui nous chanta toute l'après-midi les plus beaux chants d'opérette.
Malheureusement, arrivés à la nuit, la sorcière de mère de ma belle-sœur fit tout pour que nous partions, nous la famille de mon frère et, dès notre départ, récupéra sa famille et les gens qui lui plaisaient et ils continuèrent la nuit ensemble, sans nous. Nous l'avons su par ma belle-sœur elle-même qui ne vit aucun mal et cela et nous l'avoua. Peut-être nous le dit-elle exprès pour nous faire mal, je le pense très fort. Cela resta une vexation longtemps après.
Mes parents ramenèrent les deux soldats à Bordeaux et les déposèrent je ne sais plus où, devant un hôtel peut-être. Je revis ce jeune homme quinze jours plus tard au "grand théâtre" de Bordeaux, à une opérette : "Le pays du sourire". Petite sœur et moi étions avec nos grands-parents. J'eus plaisir à le revoir et mon cœur battit dans ma poitrine en croisant sans beau regard. Ce fut pourtant la dernière fois que je le vis. Il habitait Toulouse et ce n'était pas la porte à côté. Quel regret ce fut pour moi ! Il me convenait et j'aurais tant aimé aller plus loin avec lui. Mais voilà, ce n'était pas prévu dans mon destin. Cela aurait été trop bien !
BONNE APRÈS-MIDI
L Y D I A
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Par CHAMARIE le 14 Avril 2014 à 20:29
Je ne me souviens pas de m'être liée d'amitié avec une fille ou un garçon de cette école PIGIIER. Les cours se suivaient sans récréation. J'arrivais juste pour me mettre à ma machine à écrire. J'appris la méthode "azerty" et il fallait s'entraîner à taper sur les touches avec un cache, le but étant d'arriver à taper sans regarder ces fameuses touches. Je m'ennuyais à cent sous de l'heure pendant ce cours et je rêvais... Ensuite venait le cours de sténographie (celui que je préférais.) Je passais une bonne heure à ce cours. Puis c'était le tour d'un cours de comptabilité et je repartais vers le bus pour le retour à la maison. C'était le minimum pour une élève, les autres revenaient l'après-midi pour la plupart.
L'après-midi je faisais des "gammes de sténo" ce qui veut dire que je traduisais des phrases en signes sur cinq lignes semblables. J'eus toute ma vie une sténo excellente, c'est-à-dire en petits signes, qui me permettait de me relire facilement. Les sténos qui faisaient de grands signes étaient forcément moins rapides pour prendre en dictée. Du moins je le pense mais n'en suis pas sûre.
Quand j'étais petite et que des personnes bienveillantes me demandaient ce que je voulais faire, je répondais, sûre de moi : institutrice ou fleuriste. Je n'ai fait ni l'un ni l'autre parce que nos désirs n'intéressaient pas du tout madame Mère. Les trois filles ont appris comme moi et le garçon lui a fait une année de plus que les filles puis l'apprentissage d'ébéniste. Mère voulait à tout prix nous faire travailler tous les quatre dans l'affaire familiale. Quelle erreur ! Une monumentale erreur ! Nous aurions été tellement mieux si nous avions pu faire ce qui nous plaisait et travailler à l'extérieur.
Mon rêve d'être institutrice était très ancré en moi. C'est pour cela que je passais mes jeudis à faire l'instit avec sœur cadette. Cela m'aurait beaucoup plu et m'aurait certainement rendue heureuse. Mais il aurait fallu pour cela que j'aille en sixième d'abord puis au lycée et passer mon bac, au minimum. A cette époque il était beaucoup plus facile d'enseigner que de nos jours où les enfants commandent, où les parents les défendent et où les uns et les autres n'hésitent pas à bastonner leurs profs. Je plains les enseignants de maintenant. Mon fils est prof de musique en collège et il le gère très bien.
Même fleuriste, à la limite, m'aurait rendue plus heureuse que de rester à végéter à la maison familiale. Je ne fis ni l'un ni l'autre.
Cette année terminée, je refusais d'en faire une deuxième dans les conditions où j'avais fait celle-là. Je ne voulais plus me trimbaler avec la honte sur moi puisque il était évident que la Mère ne m'achèterait pas un sac plus convenable ni un soutien-gorge pour contenir ma poitrine bien développée.
J'attendis deux ou trois ans et là retournais prendre quelques cours mais je ne me souviens pas combien de mois cela dura.
BONNE SOIRÉE
l y d i a
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